Chancrajhes, c’est ainsi qu’on appelait les crustacés en patois poitevin, mais il faut dire que le terme était surtout employé en bords de côte.
Les crustacés sont pourtant bien présents dans nos contrées intérieures : les écrevisses et la Caridine choisissent les eaux courantes des sources et rivières, les daphnies et les copépodes optent pour les eaux stagnantes des mares et étangs, les grands branchiopodes préfèrent les eaux temporaires des ornières, fossés et autres mouillères, tandis que Niphargus et Gallaselle se fixent jusque dans les nappes phréatiques et les rivières souterraines. Nous les côtoyons même tous les jours, car ils ont aussi conquis le milieu terrestre ; ce sont alors les cloportes de nos sous-bois et jardins. En Vienne, une cinquantaine d’espèces de crustacés ont été recensées, mais des taxons entiers restent encore très largement méconnus.
Fondamentalement, les crustacés se caractérisent par l’existence d’un stade embryonnaire typique, la larve nauplius, et par une cuticule « incrustée » de sels de calcium, d’où leur nom. Au-delà, c’est un groupe très hétérogène et diversifié. Aujourd’hui les dernières phylogénies moléculaires nous apprennent qu’insectes et crustacés appartiennent à une même grande lignée évolutive, et que les insectes dériveraient d’un groupe ancien de Crustacés, les Rémipèdes, qui ferait la transition – écologique aussi – entre le milieu marin et le milieu terrestre. En d’autres termes, et pour faire simple, les crustacés dans toute leur diversité seraient les ancêtres des insectes.
Extrait de :
Vienne Nature, 2017. Bêtes et plantes de la Vienne - déambulation dans la biodiversité départementale. Vienne Nature éditions, Fontaine-le-Comte. 240 p.